Si vous faites partie des 19 % de la population française à avoir au moins un tatouage, peut-être avez-vous la crainte de vous faire licencier ? De nombreux patrons sont tatillons, voire intransigeants, vis-à-vis des tatouages, et vous ne souhaitez pas perdre votre emploi.

La loi n’étant pas claire sur le sujet, le bon sens peut amener à des raisonnements logiques. Découvrez tout ce qu’il vous faut savoir concernant le salariat et les tatouages.

tatouage et licenciement

© Can Stock Photo / lofilolo

Dois-je cacher mes tatouages au travail ? Ce que dit la loi

Factuellement, il est dit dans l’article L 1121-1 du Code du travail « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »

Qu’est-ce que cela signifie ? De manière plus concrète, toute personne intéressée par un emploi (qu’il s’agisse d’un CDI, d’un CDD, d’une mission d’intérim ou d’un stage), lors d’un entretien d’embauche par exemple, doit être considérée de la même manière, qu’elle soit tatouée ou non. La discrimination au travail étant interdite, vous n’êtes à ce moment-là pas obligé de cacher vos tatouages pour passer un entretien ou pour prendre votre poste.

Des contraintes liées à l’entreprise

Le tatouage peut être considéré comme un vêtement, et donc entrant dans le registre des libertés individuelles et vestimentaires, puisque faisant partie intégrante de votre corps. Mais il peut arriver que dans certains cas, votre employeur puisse vous demander de cacher vos tatouages, en les couvrant avec des vêtements ou avec du maquillage.

Qu’en est-il de la liberté vestimentaire ?

L’arrêt n° 02-40273 du 28 mai 2003, prononcé par la chambre sociale de la Cour de cassation, dit que « si un employeur ne peut imposer à un salarié des contraintes vestimentaires qui ne seraient pas justifiées par la nature des tâches à accomplir et proportionnées au but recherché, la liberté de se vêtir à sa guise au temps et au lieu du travail n’entre pas dans la catégorie des libertés fondamentales ».

Cela signifie que si votre tatouage nuit à vos conditions de travail ou est incompatible avec celles-ci, votre employeur peut justifier un licenciement. C’est le cas par exemple des tatouages sur les mains, le visage ou les bras, qui pourraient déstabiliser une certaine clientèle.

En revanche, vous ne pouvez pas vous faire renvoyer pour des raisons de « mauvaise image de l’entreprise ». En effet, le Défenseur des droits a noté dans une décision du 2 octobre 2019 que « les considérations générales liées à l’image de l’entreprise privée […] ne permettent pas, en tant que telles, de justifier des restrictions générales et absolues en matière de tatouage et de piercing. Les employeurs privés et publics doivent dûment justifier le caractère approprié et proportionné de ces restrictions. »

Référez-vous à votre règlement intérieur

Chaque entreprise dispose d’un règlement intérieur différent, qui stipule les droits et les obligations de chaque salarié. Ainsi, votre entreprise peut imposer un code vestimentaire dans le cadre de votre travail. Ce code vestimentaire doit cependant être justifié par la nature de l’emploi et de la tâche à accomplir (voir l’article L 1321-2-1 du Code du travail).

Si le règlement intérieur sur votre lieu de travail exige de vous que vous portiez un uniforme, ou que vous n’ayez ni tatouage ni piercing apparent, vous devez vous y conformer. Ne pas respecter le règlement constitue une faute disciplinaire, et votre employeur peut donc vous sanctionner, voire vous licencier.

Faites preuve de bon sens

Malgré toutes les libertés dont vous pouvez disposer (liberté vestimentaire, liberté d’expression) et le fait que l’employeur ne doit discriminer personne dans le cadre d’une embauche, vous devez tout de même respecter quelques points raisonnables.

Par exemple, et ce quelle que soit l’entreprise ou quel que soit votre poste, un employeur peut refuser de vous engager ou vous licencier si vous avez des tatouages particuliers. C’est le cas notamment des tatouages choquants : raciste, antisémite, sexiste, pornographique ou érotique. L’emplacement de votre tatouage est à prendre en compte également. Il est plus facile de camoufler un tatouage sur l’épaule ou sur la jambe qu’un tatouage au cou ou sur les mains par exemple. Sa taille peut aussi être un facteur d’approbation ou non : n’avez-vous qu’un petit tatouage (ou plusieurs ?) ou plutôt de gros blocs de peaux encrés ? La deuxième option étant plus difficile à dissimuler, de nombreux employeurs peuvent être réticents à l’idée de vous donner votre chance.

Dans certains postes, surtout ceux en contact direct avec le public, il peut être compliqué d’arborer des tatouages sur le visage ou sur les mains, même s’ils sont réussis. La culture d’entreprise joue un grand rôle dans la perception du tatouage : vous verrez plus souvent des artistes exhibant fièrement leurs pièces d’encre que des hommes d’affaires ou politiques tatoués.

Que faire en cas de désaccord avec mon employeur ?

Chaque situation étant différente, elles doivent être étudiées au cas par cas.

D’après les informations données dans cet article, pensez-vous respecter le règlement intérieur de votre entreprise, et ne pas afficher de tatouage choquant ou provocant ? Si rien ne vous empêche légalement d’être tatoué pour remplir vos fonctions sur votre lieu de travail et que votre tatouage n’est ni osé, ni gênant, ni trop imposant… Vous devez en discuter avec votre patron.

S’il existe des cas pour lesquels le juge a validé le licenciement (notamment un salarié en blouse blanche qui portait un bermuda en dessous et refusait de l’enlever, une salariée portant un chemisier transparent laissant voir sa poitrine ou encore un employé d’une agence immobilière qui travaillait en jogging), votre employeur doit pouvoir prouver et expliquer les raisons de votre renvoi de l’entreprise. L’inspecteur du travail étant informé des différents règlements intérieurs et de leurs clauses prend donc en compte toutes les caractéristiques pour donner son rapport, et saurait vous dire si vous êtes dans votre bon droit ou non.

Mot de la fin

Quoiqu’il en soit, les tatouages ne sont pas perçus par tous de la même façon. En respectant le règlement intérieur de votre entreprise (que vous avez accepté lors de votre embauche) et en n’ayant aucun tatouage grossier ou choquant, vous n’avez que peu de chances de vous faire licencier pour cette raison.

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